dimanche 21 février 2010

Un jeu où l'on tue.. en conscience

Dans quelle situation seriez-vous prêt à tuer un être humain ? Cette question pourrait être l'argument d'une casuistique féconde pour les jeux, et notamment les jeux vidéo, où la relation fusionnelle entre la manette et la gâchette facilite les dispositifs de meurtres en série. Et si un jeu proposait comme expérience ceci : le personnage incarné, menant une vie « normale », se retrouve bientôt dans une suite de situations où le meurtre pourrait éventuellement se justifier... Le joueur devrait donc progressivement délimiter ses frontières morales. Mais il ne suffirait pas de penser savoir quelle est la bonne décision, mais d'être capable de prendre cette décision au bon moment, voire dans l'instant où la situation l'impose. Un jeu où, si vous hésitez trop, un inconnu, puis plusieurs, puis votre famille (virtuelle..), vous, risquez la mort parce que vous n'avez pas osé tuer.. Une cause politique (de type résistance) aurait-elle aux yeux du joueur plus de prix qu'une cause familiale ? Imaginez qu'Hitler vous confie son projet en 1933... Ce jeu permettrait de redonner du sens à l'acte de meurtre, si banalisé dans le jeu vidéo. Bien sûr, cette banalisation reste symbolique, et le meurtre symbolique est une activité psychique quotidienne, avec ou sans média. Mais recréer de la rareté, dans cette logique de destruction symbolique, engagerait peut-être aussi une autre forme d'expérience, celle qui, d'après certains des meilleurs réalisateurs de jeux vidéo , manque : l'émotion. Appuyer sur la gâchette prend un tout autre sens si la décision est complexe et rare, que si c'est le vocabulaire de base du jeu (par exemple tous ces jeux qui consistent principalement à choisir son arme).
S'agirait-il d'un serious game ? Ou d'un jeu d'emo-tainment ? Il s'adresserait en tous cas à tous ceux qui cherchent à apprendre sur eux-même, plus que sur la manipulation d'un joystick. Ce serait aussi l'occasion de parler du meurtre animal : ou placeriez-vous cet acte sur votre échelle de valeurs ? Quelles situations le justifient ?
Ce qui est sûr, c'est qu'à long terme, les jeux qui resteront dans les mémoires, dans le patrimoine culturel et dans les catalogues de vente ne seront pas ceux qui se vendent le plus aujourd'hui. Dans l'acte de meurtre comme dans celui de production d'un jeu vidéo, la qualité de la décision ne dépend-elle pas d'une évaluation des conséquences, évolutives, sur la durée ?

edit : un post qui parle des avancées sur ce terrain : http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2011/12/05/tueriez-vous-une-personne-pour-en-sauver-cinq/comment-page-5/#comment-12787


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